Conférence de presse du Président de la République à l'occasion du Sommet de l'OTAN.

Conférence de presse de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion du Sommet de l'OTAN.

Imprimer

Washington, États-Unis d'Amérique, le dimanche 25 avril 1999

Monsieur le Ministre,

Monsieur l’Ambassadeur,

Mesdames, Messieurs,

Je voudrais faire le point à l’issue de ce Sommet.

Le Sommet de Washington, qui devait à l’origine célébrer le 50e anniversaire de l’Alliance atlantique, a été en réalité le Sommet de l’unité des 19 pays de l’Alliance réunis dans un même combat pour la démocratie et pour les Droits de l’homme.

Les Etats de l’Alliance ont été unanimes à condamner le comportement abominable des dirigeants de Belgrade qui poursuivent sauvagement leur politique d’épuration raciste, leurs massacres, leurs violences. Milosevic n’a pas changé. Son entêtement meurtrier demeure entier et le nombre de ses victimes ne cesse d’augmenter.

Devant cette situation, nos démocraties ont, d’une même voix, décidé de confirmer leur stratégie de frappes aériennes, comme la France l’avait souhaité, de les amplifier et de diversifier les objectifs afin de paralyser le plus vite possible l’appareil de répression serbe.

De même, les mesures d’embargo sur les armes et le pétrole nécessaires aux forces serbes ont été décidées par l’Union européenne, puis par l’Alliance. La France a souligné l’importance du respect du droit international dans la conduite de cette action.

Nous avons aussi décidé de renforcer les moyens mis en oeuvre par l’Alliance pour faire face à la tragédie qui frappe des centaines de milliers de réfugiés, des enfants, des femmes, des hommes, brutalement chassés de chez eux, séparés, ayant tout perdu. Cette tragédie a bouleversé l’ensemble de nos peuples. L’élan de générosité s’amplifie. Les associations humanitaires sont de plus en plus présentes et s’organisent. La France demande que l’appui de nos armées respecte l’indépendance de ces associations, qui souhaitent cette aide, mais qui veulent conserver cette indépendance qui leur est nécessaire.

Nous avons aussi affirmé la volonté, notre volonté de secourir ceux qui sont restés au Kosovo, dans une situation de plus en plus dramatique. Malgré les difficultés techniques, qui sont réelles, la France a demandé que tout soit mis en oeuvre pour leur venir en aide, notamment par des parachutages de vivres et de médicaments.

Mais la crise a aussi de graves effets sur l’ensemble de la région et notamment sur l’Albanie et sur la Macédoine. La France avait demandé qu’un sommet réunisse les Alliés et les sept pays voisins de la Serbie pour examiner avec eux l’aide que l’OTAN doit leur apporter pour assurer leur sécurité. Ce sommet vient d’avoir lieu. L’Alliance se tient aux côtés de ces Etats. Nous sommes décidés à préserver leur stabilité.

La situation du Monténégro a été particulièrement examinée. Et la Serbie doit savoir qu’elle subirait toutes les conséquences d’un coup de force dans cette petite république.

Mais au-delà de l’indispensable renforcement de nos actions militaires, au-delà de la solidarité que nous devons à ceux qui souffrent, il y a la nécessaire recherche d’une solution politique. Les efforts des Alliés doivent se conjuguer avec ceux de l’ONU, et aussi avec ceux de la Russie qui, vous le savez, tente de convaincre Belgrade de revenir à la raison.

Enfin, la France a réaffirmé la vocation et la volonté de l’Europe à jouer un rôle déterminant dans la mise en oeuvre, le moment venu, d’une solution durable.

A Washington, j’ai pu mesurer combien la voix de la France, deuxième puissance par les moyens engagés, était renforcée par l’unité évidente du peuple français, cette unité dont il fait preuve depuis le début du conflit. La détermination et la mobilisation de la France pour la défense des Droits de l’homme, pour la défense des libertés, donnent à notre pays une place éminente en Europe et dans le monde. Cette unité du peuple français impressionne et je tiens, ce soir, à la saluer.

Je suis prêt à répondre à vos questions.

QUESTION -

Monsieur le Président, vous avez parlé de la nécessité de respecter le droit international en matière d’embargo pétrolier qui frappe la Serbie. Est-ce que vous pourriez nous préciser, est-ce que cela signifie qu’on ne peut pas arraisonner, par exemple, un bateau d’un pays tiers qui ambitionnerait de ravitailler en pétrole la Serbie, via le Monténégro. Est-ce que ces précisions ont été apportées lors de vos discussions, ou est-ce que c’est resté un peu dans le flou ou dans une, disons, définition future au niveau militaire ?

LE PRÉSIDENT -

Il y a d’abord l’embargo, il y a ensuite l’inspection. Pour l’embargo, les choses claires. L’Union européenne a été unanime à décider un embargo à l’égard de la Serbie, elle a demandé à tous les peuples et particulièrement tous ceux qui ont un accord avec elle, et qui sont assez nombreux, de respecter cet embargo. Les pays de l’Alliance ont fait de même. Il y a donc un embargo auquel souscrit un nombre important de pays, et notamment de pays producteurs.

Il y a ensuite le problème de l’inspection, c’est-à-dire que se passe-t-il si un bateau appartenant à un pays n’ayant pas souscrit à l’embargo veut ravitailler directement, ou indirectement, la Serbie. Sur ce point, il y a des règles internationales, un droit international. J’ai dit tout à l’heure que la France avait rappelé que ce droit devait être respecté. Comme ces affaires sont toujours complexes, les responsables militaires, et le secrétaire général, M. Solana, l’a rappelé tout à l’heure, ont décidé, avec les responsables politiques, d’examiner l’ensemble de la situation pour voir comment ces mesures éventuelles d’inspection pourraient être mises en oeuvre dans le respect du droit international.

QUESTION -

Monsieur le Président, au début de cette opération de frappes aériennes, l’ordre de marche a été donné de la manière suivante, c’est-à-dire qu’on faisait une opération phasée, en trois phases : phase un, destruction des capacités militaires pour le Kosovo, deuxièmement, on allait beaucoup plus loin au sud du 44e parallèle, et après, on frappait toutes les capacités militaires de la Serbie au sud et au nord du 44e parallèle. Il semble, pour l’observateur que je suis, que nous avons complètement bouleversé cet ordre de marche qui était donné au départ. Alors, je voudrais savoir si, de votre avis, nous sommes toujours dans cette phase, définie dans le mandat donné par le Conseil atlantique aux forces de l’OTAN, ou si nous allons progressivement, et sans nous en apercevoir, passer dans cette fameuse phase trois ?

LE PRÉSIDENT -

Pour le moment nous ne sommes pas passés dans la phase trois, et d’ailleurs, cela n’a pas été proposé par les autorités militaires. Ceci étant, je vous l’ai dit tout à l’heure, nous avons décidé d’intensifier nos frappes et de diversifier les objectifs. Ce qui ne suppose pas, dans l’état actuel des choses, le passage à la phase trois, qui aurait, naturellement, aussi, une signification politique. Alors, nous en sommes là.

QUESTION -

Monsieur le Président, vous avez insisté ce matin, l’OTAN a apporté sa garantie de sécurité, en quelque sorte, aux pays voisins de la Serbie. Il y a déjà eu des accrochages, des bombardements, des actions militaires des troupes serbes dans le nord de l’Albanie et le long de la frontière macédonienne. Comment les pays de l’OTAN entendent-ils garantir la stabilité et la sécurité de ces pays voisins, en cas de visées agressives serbes, sans envisager des opérations au sol, terrestres, de défense de ces pays. Et est-ce que l’on envisage ces opérations terrestres, et est-ce que l’on s’y prépare ?

LE PRÉSIDENT -

Je me permets de vous dire que l’OTAN n’a pas garanti la sécurité, je veux dire au sens que le droit donnerait à cette affirmation. Car, si tel était le cas, nous assisterions, en réalité, de facto, à un élargissement de l’OTAN, et cela n’a pas été décidé. L’OTAN a tenu à entendre aujourd’hui les sept pays concernés, c’est-à-dire les sept pays voisins de la RFY, pour d’abord comprendre leurs problèmes, mieux savoir leurs sentiments, pour créer avec eux les liens nécessaires pour mettre en oeuvre, le cas échéant, si l’en était besoin, des mesures qui seraient de nature à préserver leur stabilité. Nous en sommes là. Et donc, il n’est pas question, dans l’état actuel des choses, d’opérations militaires et, a fortiori, d’opérations terrestres.

QUESTION -

Hier, en écoutant la conférence de presse de Bill Clinton, ni dans son propos liminaire, ni dans aucune des réponses aux questions, il n’a fait référence à l’ONU et à ce dont vous vous félicitiez hier. Est-ce que vous avez des assurances que, au-delà du texte d’hier, dans les faits, les Etats-Unis auront, dans l’avenir, la même exigence que nous, quant au préalable accord de l’ONU pour les actions de l’OTAN dans le futur ?

LE PRÉSIDENT -

Cher Monsieur, ce qui est important, c’est ce qui est dans les textes. Car les textes traduisent un engagement politique, et ne sont pas susceptibles, naturellement, d’être mis en cause. Donc, ensuite, chacun souligne ce qui l’intéresse ou ce qu’il veut développer. Mais la seule chose qui compte, ce sont les engagements pris par écrit, les textes qui sont signés par les chefs d’Etat et de Gouvernement. Alors, je vous laisse le soin de lire les textes, et vous serez, de ce point de vue, tout à fait rassuré sur les dispositions qui ont été arrêtées. Et, je l’ai dit, et je voudrais le répéter aujourd’hui, qui ont été arrêtées, grâce, pour l’essentiel, à un effort très remarquable réalisé par la diplomatie française.

QUESTION -

Monsieur le Président, combien de réfugiés pourrions-nous accueillir en plus, en Europe, provisoirement peut-être, au cas où d’autres civils sortiraient du Kosovo ? Et, pendant ce Sommet, les médias américains ont beaucoup montré d’autres images de guerre dans une école du Colorado, avec des risques, dit-on ici, que cela se répète ailleurs. Sommes-nous à l’abri en France, et croyez-vous que l’on fasse bien le travail d’explication sur les images de violence, juste ou injuste ?

LE PRÉSIDENT -

Je ne pense pas que le nombre de réfugiés qui peuvent être accueillis soit prédéterminé. Je sais que certains avaient imaginé, à un moment, de définir une sorte de quota, que l’on pourrait ainsi réévaluer ou réajuster en fonction des circonstances. Le problème, c’est que peu nombreux sont les réfugiés, pour des raisons évidentes, qui veulent s’éloigner de chez eux. Ils conservent plus ou moins, pour la plupart d’entre eux, chevillé au coeur et au corps, l’espoir de retrouver leur maison. Et ils ont le sentiment que les efforts réalisés par la communauté internationale pour rétablir les Droits de l’homme au Kosovo leur permettront de retrouver leur terre. Et donc le nombre de ceux qui, pour des raisons personnelles, souhaitent partir est un nombre assez faible, finalement. La France a pris une position très ouverte dans ce domaine, qui consiste à accueillir tous ceux qui le demandent, qui expriment la volonté de venir, généralement parce qu’ils ont de la famille.

Alors, je ne pense pas que ce nombre soit destiné à augmenter beaucoup. En tous les cas, la France a clairement dit sa disponibilité à accueillir ceux qui voudraient venir.

Le drame qui s’est passé dans une école du Colorado est un drame, je ne dirais pas spécifiquement américain, puisqu’aussi bien des drames de cette nature existent un peu partout, pas les mêmes, mais de la même nature. C’est le drame de la violence, qui s’exprime d’une façon ou d’une autre. Alors, il est probable que, sur le plan spécifiquement américain, la législation très ouverte sur les armes mériterait probablement d’être réexaminée. Je ne veux pas faire d’ingérence dans les affaires américaines, mais enfin c’est une observation que l’on peut imaginer. Heureusement, notre législation en Europe, en général, et en France en particulier, de ce point de vue, est beaucoup plus limitative et restrictive. D’autre part, il est certain que les spectacles, au sens le plus large du terme, de violence, qui sont, je dirais, probablement de plus en plus servis aux jeunes, de plus en plus jeunes, ne peuvent qu’aller dans le sens du développement de ces mauvais instincts. Pour ma part, je le déplore.

QUESTION -

Monsieur le Président, vous avez dit que la France demande à ce que l’on puisse faire des parachutages de produits alimentaires au Kosovo. Je sais que les Etats-Unis avaient exprimé des préoccupations sur la sécurité des pilotes. Pouvez-vous nous dire que ce qu’ont dit les autres dirigeants de l’Alliance à ce sujet ? Et, deuxièmement, doit-il y avoir une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies avant qu’aucune force de sécurité internationale ne puisse pénétrer au Kosovo ?

LE PRÉSIDENT -

Le texte qui a été adopté par le Sommet, vendredi, sur le Kosovo prévoit effectivement qu’une résolution du Conseil de sécurité déterminera les conditions de déploiement au Kosovo d’une force de paix et de sécurité. S’agissant des parachutages, c’est vrai que la France a été très militante pour cette idée, tout en ayant parfaitement conscience des difficultés techniques qu’elle représente. Mais cette idée a été adoptée, sur la proposition de la France, par l’ensemble des chefs d’Etat et de Gouvernement. Il appartient maintenant aux autorités militaires de l’OTAN de déterminer les conditions, je le répète, très difficiles de mise en oeuvre de cette action. J’espère qu’elle sera la plus rapide possible, et la plus efficace possible.

QUESTION -

Monsieur le Président, depuis le début de ce Sommet, on prétend que les frappes aériennes, c’est la stratégie qui est adaptée à la situation, et c’est une stratégie qui fonctionne. Qu’est-ce qui permet de dire que les frappes apportent des résultats ?

LE PRÉSIDENT -

L’observation des choses. Nous voyons, aujourd’hui, que ces frappes ont d’abord commencé à paralyser sérieusement le système de commandement et de communication serbe. Deuxièmement, elles ont obligé, pratiquement, les forces serbes au Kosovo à s’arrêter, à s’installer. Elles ont perdu leur mobilité, ce qui était tout à fait capital. Elles n’ont plus aucune mobilité. Troisièmement, ces frappes ont pour conséquence que ces forces serbes, notamment au Kosovo, sont maintenant pratiquement, pas totalement, coupées de leurs bases, et donc de leur ravitaillement. Et je n’ai pas besoin de vous dire que des unités militaires blindées qui sont coupées de leur ravitaillement, les unités en général, mais des unités militaires blindées coupées de leur ravitaillement, deviennent rapidement inefficaces. Donc, si vous voulez, la paralysie du système, l’étouffement du système de répression serbe est en bonne voie. Il n’est pas terminé, il faut poursuivre, mais il est en bonne voie. Et cette constatation justifie que, unanimes, les pays de l’Alliance ont considéré qu’il n’y avait pas lieu de changer de stratégie et qu’il fallait poursuivre la stratégie des frappes aériennes, tout en ayant conscience, je le disais tout à l’heure, de la nécessité d’amplifier ces frappes et de diversifier les objectifs retenus.

QUESTION -

Monsieur le Président, les Américains envoient des renforts militaires en Albanie, les Britanniques et les Allemands vont envoyer chacun 2000 hommes en Macédoine, en renfort. Est-ce que la France entend faire de même, et n’est-ce pas un moyen déguisé de préparer une intervention au sol ?

LE PRÉSIDENT -

D’abord, la France a anticipé, si j’ose dire, par rapport à d’autres et comme vous le savez elle avait déjà envoyé en Macédoine des troupes qui représentaient à peu près la moitié de l’ensemble du corps de Macédoine. La France n’a pas l’intention de poursuivre et d’en envoyer, sauf si c’était naturellement nécessaire. Les troupes qui ont été envoyées par les Américains, par les Anglais, par les Allemands, ici ou là, et en particulier en Albanie, sont des troupes qui avaient pour objet, soit de faciliter les opérations humanitaires, soit de protéger les unités qui viennent en appui des frappes aériennes. Je pense notamment aux soldats américains qui sont arrivés en Albanie pour assurer, et ils sont nombreux, 2000 ou 3000, la mise en oeuvre du système des hélicoptères Apache et des MLRS qui sont destinés à les protéger. Tout ceci exigeant du monde. Donc aucune de ces troupes n’a été envoyée là-bas avec la mission, ni d’ailleurs avec les équipements qui seraient destinés à en faire des troupes d’intervention terrestre, il n’y a aucun rapport.

QUESTION -

Je voudrais revenir à l’embargo pétrolier, vous avez dit que ce sommet était un sommet de l’unité. Ne craignez-vous pas que cette unité ait été quelque peu entachée par les divergences qui sont apparues sur les conditions d’application de l’embargo pétrolier ? Deuxième question, dans le même domaine, que se passera-t-il si, demain, un navire s’approche du port de Bar au Monténégro, en particulier un navire russe, ce qui peut être probable dans la mesure ou la Russie était le principal fournisseur de pétrole de la Serbie ?

LE PRÉSIDENT -

Je voudrais d’abord vous dire que l’unité, c’est le sentiment que chacun a retenu comme élément fort de l’ensemble de ces discussions. Cela a été vrai au niveau des chefs d’Etat et de Gouvernement, cela a été vrai, je le dis devant le ministre des Affaires étrangères qui me le confirmait ce matin même, au niveau des réunions qui ont lieu entre ministres des Affaires étrangères, là où il se passe les choses les plus importantes, en général, puisque c’est la mise en oeuvre des politiques.

C’est vraiment l’unité. Je veux dire que je n’ai pas le souvenir de sommets, quelle que soit leur nature, où il y n’ait eu aucune divergence de vues, pratiquement, exprimée en assemblée générale. Ce qui ne veut pas dire naturellement qu’avant, dans la préparation diplomatique des décisions, les experts n’aient pas eu à affronter leurs points de vue, de façon à arrêter les positions. Donc, c’est vraiment l’unité, je crois qu’il faut vraiment le souligner.

Sur, non pas l’embargo, je le répète, sur l’embargo il n’y a aucune discussion de qui que ce soit, sur l’utilisation des moyens d’inspection, c’est sur ce point qu’il y a discussion au niveau des militaires. Que peut-on faire, et comment, pour à la fois respecter le droit international et assurer l’efficacité de la rupture d’approvisionnement en produits pétroliers ou en armes, du régime de Belgrade. Là, il y a des discussions techniques, c’est vrai. Ne me demandez pas de vous dire comment on va faire, d’abord parce que ce n’est pas encore décidé, et que cela, c’est vraiment un problème qui relève de la compétence des militaires. Mais contrairement à ce que j’ai pu entendre ici ou là, cela n’a pas du tout fait l’objet de divergences de vues entre les responsables politiques, ministres, chefs d’Etat ou chefs de Gouvernement.

QUESTION -

Gerhard Schroeder a proposé, il y a un ou deux jours, un plan Marshall, pour les Balkans. Est-ce qu’il a eu l’occasion de vous préciser ses propositions, ce qu’il y avait dans cette proposition. Et, d’autre part, comment peut-on aider le Kosovo et le Monténégro étant donné que, dans l’état actuel des choses, ils font toujours partie de la République fédérale de Yougoslavie ?

LE PRÉSIDENT -

Le chancelier allemand a fait une proposition que la France a immédiatement soutenue, et qui est une bonne proposition, qui consiste à faire une conférence sur les Balkans, suivie de la mise en oeuvre d’un pacte pour la stabilité et le développement, je crois que c’est le nom exact, des Balkans. Et pour illustrer sa pensée, il a effectivement utilisé le mot "plan Marshall ", c’était pour illustrer sa pensée, pour dire quel était l’objectif qu’il se donnait. Car, naturellement, il ne s’agit pas de répéter l’opération du plan Marshall. Nous sommes tout à fait favorables au plan du chancelier allemand, et nous l’avons soutenu, et je l’ai encore dit ce matin.

QUESTION -

Qu’est-ce qu’on met dedans ?

LE PRÉSIDENT -

Premièrement, ce n’est pas une action immédiate. Il faut d’abord qu’il y ait le retour à la paix, qu’une solution politique durable ait été trouvée dans la région. A partir de là, cette région présentant un certain nombre de caractéristiques politiques, économiques, et sociales qui exigent, je dirais, un effort de solidarité pour renforcer sa stabilité et assurer son développement, il faudra, tous ensemble, avec ces pays, et la réunion que nous avons eue aujourd’hui préfigure un peu en quelque sorte ce qui se passera, il faudra voir comment on peut mettre en oeuvre une politique de stabilité et de développement. C’est cela l’objet de la conférence, d’abord, et du pacte, ensuite, auxquels le chancelier allemand se réfère, et que nous approuvons. Mais il est prématuré de dire ce que l’on fera et comment on le fera. C’est l’expression d’une volonté, d’une solidarité pour la stabilité et le développement de cette région.

QUESTION -

Quand vous évoquiez, tout à l’heure, les forces de répression serbes, vous évoquiez les forces terrestres. Or, il semblerait que, depuis quelques jours, les forces aériennes de la République fédérale de Yougoslavie, avions et hélicoptères, aient repris des opérations de répression contre les réfugiés. Je voudrais savoir si vous pensez que cette information est exacte, si l’Alliance a reçu des instructions pour faire en sorte que ces vols cessent et si, dans cette hypothèse, les Français mettraient des moyens supplémentaires pour mener de telles opérations ?

LE PRÉSIDENT -

Je voudrais d’abord vous dire que la France est le deuxième contributeur militaire au niveau de l’importance des moyens mis à la disposition des alliés dans cette opération du Kosovo. Et il n’est pas exclu que, si on lui demande, elle augmente encore sa contribution, en avions ou en autres moyens.

Deuxièmement, s’agissant des forces aériennes serbes, on ne les a pas découvertes aujourd’hui. Tout à l’heure, votre confrère faisait allusion à la phase un, qui précisément a eu pour objet de viser à la fois les défenses anti-aériennes serbes, -c’est-à-dire les missiles sol-air-, et les avions et les aérodromes. Cela a été les premiers objectifs. Et, effectivement, les objectifs ont été très largement atteints, et l’on peut dire qu’une part importante de la capacité en matière de défense antiaérienne comme en matière aéronautique des forces serbes a été anéantie.

Alors, naturellement, il reste des moyens, ceux qui ont été dissimulés, ceux qui n’ont pas été atteints. C’est vrai pour un certain nombre de missiles, mais vous aurez observé que déjà, à partir d’une certaine altitude, nous avons la maîtrise totale de l’espace aérien. Ce n’est qu’en dessous d’une certaine altitude que nous ne l’avons plus, à cause notamment des missiles sol-air, plus qu’à cause des avions. Encore que les Serbes en ont encore quelques-uns. Enfin, je ne dirais pas que c’est de là que vient le danger principal.

QUESTION -

Après un mois de frappes aériennes, est-ce qu’il y a des signes tangibles d’affaiblissement du régime du Président Milosevic ? On dit qu’il fait le ménage à un rythme assez accéléré parmi ses généraux. Qu’en est-il exactement, est-ce qu’on a des indications ?

LE PRÉSIDENT -

Notre objectif, c’est l’affaiblissement des forces de répression, c’est-à-dire essentiellement des forces militaires, paramilitaires ou des forces de police, de leurs moyens et naturellement des moyens de commandement et de communication qui permettent d’utiliser ces forces dans le but qu’hélas nous connaissons. Il y a incontestablement un affaiblissement de ces capacités, et on le ressent jour après jour. J’ajoute que les choses s’accélèrent toujours. Au début, un certain nombre de choses peuvent être visées et détruites, mais ce n’est pas pour autant que cela met en cause la capacité générale d’action et de répression. Puis, plus cette capacité est atteinte et plus l’efficacité, plus que proportionnellement, est accrue. Nous sommes arrivés, je crois, à la période où chaque coup porté prend vraiment de l’importance et a des conséquences. Autrement dit, le même coup, porté aujourd’hui, est évidemment beaucoup plus efficace que porté il y a un mois. Parce que le système s’affaiblit. Donc, oui, je crois qu’on peut parler d’affaiblissement.

QUESTION -

Durant ces deux mois, est-ce que vous pensez que le Président Milosevic a été suffisamment affaibli pour envoyer une force internationale même si les Russes ne sont pas totalement avec vous. Insisterez-vous quand même pour que le Conseil de sécurité approuve un tel déploiement, même si le reste de vos alliés insistent pour dire que l’heure est venue d’y aller, même s’il y a un veto russe, ou non ?

LE PRÉSIDENT -

Chère Madame, je ne suis pas sûr que votre question soit tout à fait d’actualité. D’abord parce que personne n’a discuté au cours de ce sommet d’un changement de stratégie. La stratégie utilisée a été confirmée, c’est-à-dire qu’il n’est pas question, qu’on n’a pas étudié un changement de stratégie. Donc, je ne peux pas répondre à votre question. Ensuite, vous avez pu voir que dans une autre partie du sommet, celle qui parlait du concept, nous avons réaffirmé que la décision finale devait appartenir à l’instance qui incarne l’état de droit international, c’est-à-dire au Conseil de sécurité de l’ONU. Et donc, s’il devait y avoir des décisions de la nature de celles que vous évoquez, il faudrait bien entendu que ce soit discuté au niveau du Conseil de sécurité.

Je vous remercie





.
dépêches AFPD3 rss bottomD4 | Dernière version de cette page : 2004-07-27 | Ecrire au webmestre | Informations légales et éditoriales | Accessibilité