Propos tenus par le Président de la République à l'issue du déjeuner de travail consacré à la lutte contre la drogue et la toxicomanie.

Propos tenus par M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'issue du déjeuner de travail consacré à la lutte contre la drogue et la toxicomanie.

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Sous-Préfecture, Soissons, Aisne, le vendredi 5 juin 1998

C'était une journée très intéressante pour moi. La visite du Centre de Bucy-le-Long est exemplaire de ce que l'on peut faire, de ce qui devrait se généraliser. Car nous sommes " très insuffisants " en centres de traitements. Pour quelque 150 ou 160 000 héroïnomanes, nous avons 230 ou 250 centres, pas plus.

Nous avons eu également un dialogue avec tous les partenaires, notamment des administrations, de la Justice, de l'école, enfin de l'Education nationale, de la police, de la gendarmerie, de la préfecture, de la médecine d'où j'ai tiré deux conclusions.

La première : il ne faut pas libéraliser. Je suis personnellement contre la libéralisation et chaque fois que je rencontre des professionnels, cela me conforte dans cette idée. Car il n'y a de prévention sans pédagogie, mais il n'y a pas non plus de prévention sans interdits.

La deuxième conclusion que je tire, c'est qu'il y a, aujourd'hui, dans notre pays, un effort considérable de la part des différentes administrations ; un effort dynamique et intelligent de concertation, de coopération, de cohérence dans l'action entre les différents services au profit d'une lutte plus efficace contre la toxicomanie sous ses différentes formes. Et Dieu sait qu'il y en a plusieurs !

QUESTION - La toxicomanie, c'est un sujet que vous maîtrisez bien. Avez-vous appris des choses en venant ici ?

LE PRÉSIDENT - J'ai régulièrement des réunions avec des spécialistes de la toxicomanie, et, à chaque fois, j'apprends des choses. C'est un sujet infiniment complexe que nous traitons sur le plan du terrain ou que nous traitons sur un plan international, comme je vais le faire à la réunion de l'Assemblée générale de l'ONU, lundi à New York. Il y a toujours beaucoup de choses à apprendre. C'est une hydre multiforme et complexe qu'il est très difficile de maîtriser et il faut renforcer tous les efforts de nature à la maîtriser. Ces efforts sont des efforts de terrain, village par village, presque maintenant, car le secteur rural est touché, de même que de plus en plus de jeunes, et même de très jeunes sont touchés. Et c'est un problème dont l'aspect international, par l'importance des mafias, l'argent qu'elles représentent, la production qui est générée aussi bien en drogue traditionnelle qu'en drogue chimique. Tout cela crée des problèmes considérables. Et je crois qu'il faut une véritable volonté pour essayer, de façon humaine, naturellement, mais de façon efficace de maîtriser ces problèmes. Alors, il y a, pour simplifier à la fois, je dirais, le consommateur, qui lui, d'une certaine façon est un malade auquel il faut tendre la main, auquel il faut donner les moyens de sortir de sa dépendance. Et c'est très difficile. Et il y a ce que l'on appelle le dealer, celui qui vend, celui qui transporte, celui qui crée, qui fabrique. A cet égard, il faut être extrêmement répressif et beaucoup plus que nous le sommes aujourd'hui.

QUESTION - D'après ce que vous avez vu et entendu, allez-vous modifier le discours que vous comptez prononcer à l'ONU ?

LE PRÉSIDENT - Je ne vais pas le modifier, mais je vais peut-être y mettre une touche de sensibilité supplémentaire. Ce que j'ai appris, notamment ce matin en visitant le Centre, c'est que, contrairement à ce que certains croient, je ne porte pas de jugement, je ne suis pas un expert, mais la famille ne doit pas être ignorée dans le cadre du traitement d'un toxicomane.

Ce matin le Centre que j'ai visité -je l'ai remarqué- donne une place particulière à la famille. Il n'y a pas de coupure entre le toxicomane et sa famille. Et j'ai l'intuition que c'est la bonne voie.

QUESTION - Est-ce que la concertation et la coopération que vous avez saluées entre différents services en France est efficace, et aussi efficace, au niveau de l'Union européenne, selon vous ?

LE PRÉSIDENT - Naturellement au niveau de l'Union européenne, il ne s'agit pas de la même nature de concertation. C'est une concertation entre pays dans tous les domaines qui touchent à la production, à la lutte contre le crime organisé, contre le blanchiment de l'argent sale etc. Elle n'est jamais suffisante. Elle suppose que tous les pays adoptent les mêmes critères, les mêmes valeurs, et surtout les mêmes législations. En Europe, il y a encore du progrès à faire.

Je vous remercie.





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