Intervention de Mme Sunita NARAIN

Intervention de Mme Sunita NARAIN, directrice du Centre pour la science et l'environnement.

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Palais de l'Élysée, Paris, le 2 février 2007.

Merci, Monsieur le Président.

Je suis, comme vous, un peu irritée lorsque les choses ne se font pas. Mais pour vous donner une idée de ce que nous avons débattu, hier, dans cet atelier, je vous dirai que tout le monde a très clairement dit que la crise de l'environnement exige une réponse, une réaction et des actions rapides. Nous nous sommes mis d'accord également pour dire qu'il fallait faire les choses différemment, qu'il s'agisse de ceux qui travaillent dans l'environnement, ceux qui sont les ministres de l'environnement ou travaillent dans l'industrie. Ils doivent agir différemment. Il faut que le monde réinvente une nouvelle voie pour progresser. Il nous faut faire preuve d'inventivité ; de créativité pour trouver cette nouvelle voie. Nous avons aussi besoin de beaucoup de compassion et la possibilité d'apprendre à vivre tous ensemble. Nous parlons d'un monde que nous partageons, nous parlons de ce monde mais, jusqu'à présent, nous n'avons pas encore réussi à vivre tous ensemble dans le monde.

C'est la seconde idée sur laquelle tout le monde était d'accord. Non seulement il est urgent d'agir, mais les institutions mondiales qui ont été conçues pour cela, n'ont pas rempli leur mission : la gouvernance mondiale est fragmentée, le processus de réforme est aussi totalement fragmenté au niveau des Nations unies, le processus politique qui doit suivre tout cela est encore plus fragmenté, émietté. Par conséquent, cela exige des réformes urgentes et un renforcement des institutions mondiales, si véritablement on veut relever le défi qui est le nôtre aujourd'hui.

Il a été dit aussi que cet échec entraîne un manque de crédibilité, les gens dans les pays au niveau local disent : pourquoi les institutions mondiales ne répondent pas à nos attentes, pourquoi 20 ans après, continuons-nous à parler de gouvernance internationale ? Il y a de nombreux accords internationaux, et pourtant nous ne sommes pas parvenus à réparer la situation et combler le fossé entre riches et pauvres. C'est donc une crise de crédibilité et c'est par conséquent quelque chose qui doit nous inciter à reconstruire nos institutions.

Il y a aussi quelque chose qui est apparu très clairement, c'est que ce changement exige un leadership. Tout le monde dans la salle a dit qu'ils étaient venus ici, à Paris, essentiellement parce qu'ils se sont rendus compte de votre engagement personnel dans ce sens, Monsieur le Président. Ils ont ressenti ce leadership que vous incarnez dans le monde et dont on a tellement besoin. Donc, merci, Monsieur le Président. Vous devez maintenant élargir ce que vous avez fait. Il faut réunir encore davantage autour de vous, parce que nous avons besoin d'un leadership au plus haut niveau. Il y a une réforme institutionnelle qui ne peut pas intervenir au niveau bureaucratique, elle doit se faire au plus haut niveau politique.

Autre question : nous avons besoin d'idées, nous vivons dans un monde inter dépendant. Les négociations que nous avons eues, ces dernières années, les accords auxquels nous sommes parvenus, sont l'armature de ce que nous voulons. Le processus de gouvernance internationale a réuni les pays, bien sûr, mais il y a aussi des modes de production, de consommation, qui sont tels que ce qui est fait dans un pays est repris dans un autre pays. C'est la raison pour laquelle nous avons besoin, dans ce processus de mondialisation économique, d'une mondialisation politique, parce que les négociations, les accords jusqu'à présent, sont guidés pratiquement par les impératifs du marché. Pour qu'il y ait des transactions entre pays et là, aucun principe de bonne gouvernance ne les oriente. Et il faut que, à la base, le principe d'équité règne. C'est la raison pour laquelle, dans nos discussions, nous devons revenir sur cette nécessité de la réforme institutionnelle. Il ne s'agit pas d'ajouter un étage supplémentaire, mais il faut revoir les choses pour se doter vraiment d'une structure qui permettra de conduire le monde. Il est apparu clairement hier, dans notre séance de travail, parmi toutes ces personnes venues d'horizons différents, qu'il fallait revenir sur les résultats de la Conférence de Rio. Maintenant, les pays du sud sont des partenaires qui doivent et veulent agir dans ce domaine de l'environnement. Ces pays essayent, avec leurs moyens, de faire quelque chose pour l'environnement. Pour ces pays, environnement et développement doivent aller de pair. Il est évident que le défi qui s'offre à nous, c'est de trouver un équilibre entre le besoin de conservation de la nature et le besoin de se développer. Tous ces pays du sud font de leur mieux, mais je crois qu'il y a une leçon autre qui a été apprise par le sud : c'est que les pays du ord avaient dit que la gestion de l'environnement était une chose aisée. Or les pays riches gèrent leurs questions environnementales sans se préoccuper des autres. Par conséquent, on vous demande très souvent de faire des choses que d'autres ne font pas. Les pays du sud essayent de motiver les pays du nord, mais avec des ressources beaucoup plus limitées. Je pense que c'est essentiel pour eux de réinventer, de retrouver une nouvelle voie sur la base de l'équité, pour parvenir à un développement durable. C'est pour cette raison que la réforme institutionnelle a repris l'idée du développement durable et doit reprendre les problèmes et les préoccupations des pays du sud. Il faut que se créée une coalition entre le Nord et le Sud, entre partenaires désireux de marcher la main dans la main.

Monsieur le Président, nous avons besoin, bien sûr, d'institutions efficaces, qui devront être respectées, non pas uniquement par les pays du sud, mais surtout par ceux du nord. Une institution capable de créer permettrait d'assurer un monde plus juste, plus écologique, et c'est là la question qui se pose à la communauté internationale.

On doit comprendre aussi que, au niveau local, les gens ont envie de sauver leur environnement. De nombreuses municipalités travaillent à cela et une nouvelle institution devra aussi se fonder sur l'énergie, le dynamisme, l'engagement de ces citoyens de la terre. Car c'est là que nous pourrons comprendre comment les choses peuvent véritablement fonctionner.

Bien sûr, il y a eu beaucoup d'avertissements qui ont été lancés. On ne peut pas répéter les erreurs du passé. On a d'abord agi avec idéalisme, pour se rendre compte que l'on a créé des institutions qui ne fonctionnent pas, s'ajoutant sans plus-value à la multiplicité des institutions existantes ; cela ne ferait qu'ajouter à la confusion. L'essentiel est de ne pas créer une institution qui deviendrait une excuse pour ne rien faire. Le monde ne peut plus perdre de temps et d'énergie. Voilà les paroles sages, les avertissements que nous avons entendus hier après-midi.

Comment faire, alors ? Nous aimerions proposer ce qui suit : nous avons besoin d'une réforme institutionnelle, d'une nouvelle institution ou du renforcement des institutions existantes qui pourraient jouer le rôle que j'ai présenté. Nous avons besoin de prendre des mesures courageuses, mais ne pas tomber dans des choses qui ne remettrait pas les choses en cause profondément. Il faut essayer de réduire la paperasse, d'agir vite. Notre groupe propose de renforcer les processus existants pour réformer le PNUE et les autres institutions et créer un Groupe des amis de l'ONUE pour aller plus profondément dans ce processus d'engagement. Simultanément, grâce à un groupe de travail incluant le Groupe des 77 et les autres pays, de lui donner corps, de la forme. Il faut prendre des décisions aujourd'hui qui nous assurerons que, dans un avenir très rapide, nous apporterons les changements radicaux énormes dont nous avons besoin. Cependant, nous ajoutons que cette institution, et c'est le plus grand défi, ne peut pas se construire si nous ne capturons pas l'esprit et le cœur des individus. Cette institution doit se situer au centre de la crise que nous connaissons, elle ne doit pas être simplement une réponse, mais être aussi le ministère des citoyens de la terre, qui nous permettra de définir la voie que nous allons choisir. Nous avons foi en cette institution, mais nous aimerions que les choses se fassent sans oublier l'urgence de l'action.





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