Sommet du G8 de Gleneagles - rencontre/déjeuner avec des chefs d'Etat africains.

Sommet du G8 de Gleneagles.

Rencontre et déjeuner avec des chefs d'Etat africains.

Vendredi 8 juillet 2005 - 11h30 - 15h00.

Eléments d'intervention du Président de la République.

Document de travail.

L'Afrique va mieux. Les problèmes y demeurent immenses : la violence, la pauvreté, la faim -je pense en particulier, en ce moment, au Niger-, la maladie et l'ignorance continuent à y sévir. Mais, en 2004, la croissance y aura été supérieure à 5%, meilleure performance des huit dernières années.

Ces progrès, l'Afrique les doit d'abord à elle-même. Aux efforts qu'elle a engagés pour mettre sa maison en ordre : résoudre ses conflits ; améliorer la gouvernance ; libérer l'initiative de ses entrepreneurs ; avancer dans la voie de l'intégration régionale.

L'Afrique est aujourd'hui un continent en mouvement. Un continent jeune, où la moitié de la population a moins de dix-sept ans et revendique son droit à l'avenir. Un continent qui s'urbanise et invente sa modernité.
Nous ne devons pas aider l'Afrique par charité. Mais parce qu'elle change, parce qu'elle a décidé de prendre son destin en main.

Le G8 a fait, à Kananaskis et à Evian, le choix stratégique du partenariat avec l'Afrique en soutenant le processus du NEPAD. Aujourd'hui, nous avons l'occasion de donner ensemble une nouvelle impulsion à ce partenariat.

Dans quelques semaines, nous nous retrouverons à New York pour le sommet des Nations Unies sur les objectifs du Millénaire. L'Afrique est encore loin du but. Mais elle est aujourd'hui en mesure de rattraper son retard. Elle en a la volonté. Elle en a les capacités. Mais, devant l'ampleur de la tâche, les moyens lui font défaut.

Le devoir moral mais aussi l'intérêt bien compris des pays développés sont de donner à l'Afrique les moyens de libérer son immense potentiel, de s'insérer dans la dynamique de la mondialisation. Pour cela, l'aide au développement est indispensable, non pour se substituer à l'initiative privée mais pour lever les obstacles structurels au développement.

25 milliards de dollars supplémentaires par an pour l'Afrique, tel est l'effort nécessaire. La France, qui s'est fixée dès 2002 un calendrier pour atteindre l'objectif de 0,7%, en prendra toute sa part. L'Europe a donné l'exemple en s'engageant à porter son effort collectif à 0,56% de son PNB en 2010, ce qui représentera 32 milliards d'euros supplémentaires chaque année, dont 16 milliards pour l'Afrique.

L'annulation de la dette multilatérale des pays pauvres très endettés a constitué une avancée importante. La France a veillé à ce qu'elle soit bien financée, afin de préserver la capacité d'intervention de la Banque mondiale, du FMI et de la Banque africaine de développement. Mais cette annulation ne traite qu'une partie du problème. Je souhaite qu'une solution, sur la base de l'approche d'Evian, soit trouvée pour la dette des pays à revenu intermédiaire. Je soutiens à cet égard le processus engagé au Club de Paris pour un traitement rapide de la dette du Nigeria.

Les mécanismes innovants proposés par la France et d'autres pays peuvent contribuer de manière déterminante au développement de l'Afrique. En apportant des ressources additionnelles et pérennes, les prélèvements internationaux de solidarité sécuriseront le financement du développement. Associés à l'IFF, dont ils faciliteront le remboursement, ils permettront de dégager très rapidement les sommes nécessaires à une action décisive pour vaincre la pauvreté.

La France propose à tous les pays qui le souhaitent de s'associer à elle pour lancer en septembre, à New York, un premier prélèvement international de solidarité sur les billets d'avion.

Ces moyens nouveaux devront être concentrés sur les obstacles structurels au développement, dans trois domaines prioritaires :

  1. Premier domaine la santé, afin notamment de lutter contre les grandes pandémies. C'est pourquoi la France propose d'affecter d'abord le produit du prélèvement sur les billets d'avion à l'achat de médicaments contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Ce peut être une contribution décisive pour atteindre l'objectif d'accès universel aux traitements des malades du sida en 2010. Ce sera aussi l'assurance de la pérennité de la ressource, nécessaire à un traitement dans la durée et indépendant des aléas budgétaires.
    Sans attendre ces premiers financements innovants, dont je souhaite qu'ils soient en place dès l'année prochaine, la France a décidé de doubler d'ici 2007, de 150 à 300 millions d'euros, sa contribution au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.
  2. Deuxième domaine, l'éducation : pour atteindre sur le continent l'objectif d'éducation primaire universelle, obligatoire et gratuite en 2015. Mais également pour former, dans l'enseignement professionnel et supérieur, les cadres dont l'Afrique a besoin pour son développement. A cet égard, je souhaite que l'on traite sérieusement le problème de la fuite des cerveaux et des incitations au retour pour les étudiants africains qui viennent se former dans les universités et les écoles des pays développés.
  3. Troisième domaine les infrastructures, pour désenclaver les campagnes, structurer des espaces économiques régionaux, relier l'Afrique au reste du monde. L'Afrique a besoin de routes, de chemins de fer, de ports, d'aéroports, de réseaux de télécommunications et d'énergie. C'est là un des objectifs du NEPAD. Ce doit être un axe prioritaire de notre partenariat, notamment à travers les partenariats public/privé.
    Aider l'Afrique à sortir de la pauvreté, c'est également libérer les capacités d'entreprendre de ses femmes et de ses hommes. La microfinance peut y contribuer de manière décisive.

Aider l'Afrique à sortir de la pauvreté, c'est enfin mettre un terme au scandale de sa marginalisation dans le commerce international, où sa part est tombée en vingt ans de 10 à 2%.

La conclusion du cycle de Doha en 2006 pourra y contribuer, à condition de ne pas perdre de vue l'objectif de développement de ce cycle. Il est essentiel, en particulier, de prendre en compte les intérêts spécifiques de l'Afrique sur :

  • l'élimination des subventions agricoles à l'exportation : l'Europe en a accepté le principe, voici un an, sous réserve de réciprocité de la part des autres pays développés. Cette élimination sera progressive mais devra concerner prioritairement les aides les plus déstabilisantes pour l'Afrique ;
  • le coton. Dix millions de producteurs d'Afrique de l'Ouest sont toujours pénalisés par les subventions allouées à quelques dizaines de milliers de producteurs des pays riches. Nous devons mettre un terme rapidement à cette situation ;
  • la question plus générale du prix des matières premières, sur laquelle nous devons relancer les travaux à l'OMC et dans les institutions financières internationales ;
  • les préférences commerciales, qu'il faut évidemment améliorer et simplifier, pour permettre à l'Afrique d'en tirer tous les bénéfices potentiels, mais qu'il faut également pérenniser.

A cet égard, il est temps de reconnaître que l'Afrique n'est pas prête pour le libre-échange avec les pays développés. Celle-ci doit pouvoir exporter davantage mais également pouvoir protéger son marché intérieur. C'est ce qui m'a conduit à demander à l'Union européenne de réexaminer en profondeur le concept de ses futurs accords de partenariat économique avec ce continent.

Enfin, l'Afrique subit aujourd'hui la concurrence croissante des pays émergents. Au moment où ces derniers aspirent à jouer un rôle accru dans les affaires du monde, il leur appartient de faire aussi un effort de solidarité envers les plus pauvres. A cet égard, je souhaite que le cycle de Doha ouvre la voie à un plus grand développement du commerce Sud-Sud.





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