La lutte contre les pratiques abusives au sein du système financier international. Rapport des ministres des Finances du G7 aux chefs d'état et de gouvernement (Rome)

Rapport des ministres des Finances du G7 aux chefs d'Etat et de Gouvernement

Rome, le 7 juillet 2001

LA LUTTE CONTRE LES PRATIQUES ABUSIVES AU SEIN DU SYSTEME FINANCIER INTERNATIONAL

A. Introduction

1. L'année dernière, lors du sommet d'Okinawa, les chefs d'Etat et de Gouvernement du G7 ont approuvé notre rapport intitulé La lutte contre les pratiques abusives au sein du système financier international. Il recommandait en particulier que les gouvernements intensifient leur coopération et renforcent les structures internationales existantes pour combattre efficacement le blanchiment de capitaux et les pratiques fiscales dommageables et faire en sorte que les normes internationales et le principe de bonne gestion des affaires publiques soient mieux respectés. Nous avions appelé à une meilleure coordination des travaux engagés au sein des différentes instances internationales et à la mise en oeuvre d'actions de suivi dans les plus brefs délais, et avions insisté sur la nécessité de poursuivre un dialogue ouvert et d'aider les pays qui en auraient besoin à se conformer aux normes internationales en leur fournissant une assistance technique. Nous avions également souligné la nécessité d'encourager la coopération internationale entre les organismes de répression, les administrations fiscales et les autorités de réglementation dans le cadre de la lutte contre la délinquance et les pratiques abusives dans le secteur financier.

2. Des progrès sensibles ont été réalisés au cours de l'année écoulée. Nous préconisons les actions ci-après au cours de l'année à venir afin de poursuivre la lutte contre les pratiques financières abusives.

B. Blanchiment de capitaux

3. L'année dernière, le Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI) a identifié 15 pays et territoires non coopératifs (PTNC) et nous avons conjointement envoyé des avis aux institutions financières de nos pays pour les inviter à être particulièrement attentives aux transactions effectuées avec des entités domiciliées dans les PTNC.

4. Nous notons que la situation s'est sensiblement améliorée. Nous saluons les progrès que les Bahamas, les Îles Caïmans, le Liechtenstein et Panama ont réalisés en promulguant des textes législatifs et en renforçant les dispositifs existants, mais soulignons la nécessité de continuer à prêter attention à plusieurs questions de mise en oeuvre. Nous prenons note de la décision du GAFI de retirer ces juridictions de la liste des PTNC, et annulerons ou réviserons nos avis. Nous préconisons que le GAFI continue à assurer le suivi de la mise en oeuvre des normes anti-blanchiment par les juridictions, en coopération avec les organismes régionaux compétents de lutte contre le blanchiment de capitaux.

5. Il reste toutefois des défis à relever :

· Le GAFI a constaté que Nauru, les Philippines et la Russie n'avaient pas réalisé de progrès suffisants. Conformément aux recommandations du GAFI, nous appliquerons à l'automne des contre-mesures coordonnées à l'endroit de ces juridictions si celles-ci ne procèdent pas à des réformes significatives d'ici là.

· Huit autres juridictions (Îles Cook, Dominique, Israël, Liban, Îles Marshall, Niue, St. Kitts et Névis, St. Vincent et les Grenadines) ont réalisé quelques progrès mais pas au point de rendre leur législation conforme aux normes requises ou d'achever la mise en oeuvre des réformes législatives. Nous invitons ces juridictions à prendre les mesures nécessaires pour qu'elles puissent être retirées de la liste le plus tôt possible.

· Enfin, le GAFI a ajouté à la liste des PTNC l'Egypte, le Guatemala, la Hongrie, le Myanmar et le Nigeria. Nous invitons instamment ces juridictions à rapidement remédier aux lacunes mises en évidence dans leurs dispositifs de lutte anti-blanchiment.

6. Nous approuvons la décision du GAFI de continuer à assurer le suivi des progrès réalisés par l'ensemble des juridictions figurant sur la liste des PTNC. Nous recommandons que le GAFI envisage de prendre des mesures supplémentaires au cas où ces juridictions relâcheraient leurs efforts. Nous poursuivrons un dialogue régulier avec les juridictions qui s'engagent à intensifier leurs efforts dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et nous leur fournirons, le cas échéant, une assistance technique.

7. Les nouvelles tendances du blanchiment de capitaux observées au cours de ces dernières années soulignent la nécessité de renforcer les normes de lutte contre le blanchiment. Nous saluons le processus de réexamen des 40 Recommandations engagé par le GAFI, qui devrait aboutir à l'actualisation de l'ensemble des normes. Nous invitons le GAFI, en sa qualité d'organisme de normalisation international, à veiller à ce que le processus de réexamen soit ouvert, transparent et consultatif. Il y a lieu, notamment, de prévoir des consultations avec les autres organismes de lutte contre le blanchiment de capitaux, les IFI et autres organisations internationales concernées, les pays qui ne sont pas membres du GAFI et des experts du secteur privé.

8. Nous notons que des progrès importants ont été réalisés sur quatre points identifiés comme essentiels pour lutter contre le blanchiment de capitaux dans le rapport que nous avons élaboré à l'occasion du sommet de Fukuoka :

· " Ouvreurs de porte " : La Conférence ministérielle du G8 sur la lutte contre la criminalité transnationale organisée qui s'est tenue à Moscou en 1999 avait pris acte de la nécessité d'associer les professionnels tels que les avocats ou les comptables à la lutte contre le blanchiment de capitaux. Depuis lors, cette question a fait l'objet d'un débat approfondi tenant compte des différences existant entre les systèmes juridiques nationaux. Nous continuerons à rechercher des solutions appropriées. Nous prenons note, à cet égard, des nouveaux textes législatifs adoptés par le Canada et de la proposition de directive communautaire. Nous continuerons parallèlement à oeuvrer à la définition de solutions adaptées et nous encourageons le GAFI à se pencher sur ces questions dans le cadre du réexamen de ses 40 Recommandations.

· Système de paiements internationaux : Nous nous réjouissons que le Comité sur les systèmes de paiement et de règlement des banques centrales des pays du G10 ait indiqué que les aspects techniques ne constituaient pas un obstacle à l'identification des donneurs d'ordres dans les transferts électroniques de fonds internationaux. Nous nous engageons à intégrer cette information dans nos systèmes nationaux et encourageons vivement le GAFI à faire de même lorsqu'il réexaminera ses 40 Recommandations.

· Véhicules juridiques : Le fait que dans certaines conditions, les structures sociétaires puissent être utilisées à des fins illicites, comme le blanchiment de capitaux, continue à susciter notre inquiétude. Nous saluons le rapport de l'OCDE sur les véhicules juridiques, qui propose un éventail de solutions possibles pour résoudre ce problème. Il est indispensable que dans le cadre d'une enquête sur des activités illégales, les autorités nationales de réglementation et de surveillance puissent, dans le respect du cadre juridique national, faire leur travail et obtenir et échanger des renseignements sur les propriétaires effectifs et les entités qui contrôlent les véhicules juridiques constitués sur leur propre territoire. Nous nous félicitons de la décision du GAFI d'élaborer des normes appropriées pour prévenir le recours illicite aux véhicules juridiques.

· Actifs détournés : Le blanchiment par des fonctionnaires d'actifs provenant de vols, du détournement de richesses nationales ou de la corruption suscite notre inquiétude. Nos experts ont commencé à examiner et à débattre des bonnes pratiques, s'agissant de l'identification, de la recherche et de la restitution à leur propriétaire légitime des actifs étrangers détournés. Nous préconisons le renforcement et l'élargissement de la coopération internationale sur cette question.

C. Centres financiers offshore

9. L'année dernière, le Forum sur la stabilité financière (FSF) a publié un rapport qui recommandait des mesures permettant d'améliorer les réglementations et les systèmes de surveillance ainsi que la coopération au sein de tous les centres financiers offshore (OFC). Ce rapport a été suivi par une évaluation de l'application des normes internationales pertinentes par les OFC, lesquels ont ensuite été classés en fonction de la qualité estimée de la surveillance exercée, de la réglementation et de leur volonté de coopérer. Dans certains centres financiers offshore, la surveillance et la réglementation du secteur financier ont été considérées comme insuffisantes et même susceptibles d'accroître la vulnérabilité du système financier international. Dans certains cas, ces insuffisances s'étendaient aux véhicules juridiques.

10. Nous constatons que la publication du rapport du FSF sur les centres financiers offshore et le classement de ces derniers a incité plusieurs OFC à prendre des mesures. Nous saluons les initiatives législatives prises par certains centres financiers offshore ainsi que les efforts qu'ils déploient pour renforcer la surveillance et améliorer la communication de renseignements financiers. Nous les encourageons à se conformer aux normes internationales pertinentes, notamment celles concernant (i) la coopération et l'échange d'informations entre pays, (ii) les pratiques et pouvoirs de surveillance et (iii) l'identification des clients et l'archivage des documents.

11. Dans son rapport, le FSF a préconisé que le FMI instaure un processus destiné à évaluer l'observation des normes par les OFC. Nous saluons la décision du FMI de mettre en oeuvre cette recommandation et notons que la réalisation de son initiative portant tant sur la surveillance dans le secteur financier que sur les statistiques est bien avancée. Nous nous félicitons que plusieurs centres financiers offshore aient décidé de travailler en étroite collaboration avec le Fonds et nous constatons que cette initiative les a déjà conduits à réexaminer leurs pratiques.

12. Les autorités nationales, les organismes de normalisation et d'autres institutions financières internationales soutiennent le programme d'évaluation du FMI, en mettant à la disposition des centres financiers offshore des ressources destinées à les aider à mettre en oeuvre les réformes requises et en leur fournissant la formation nécessaire. Nous constatons toutefois que bien qu'ils aient la volonté de prendre des mesures concrètes, de nombreux centres financiers offshore ne disposent pas de ressources suffisantes pour mener à bien les améliorations requises. Nous continuerons de nous efforcer de leur fournir une assistance technique tant bilatérale que multilatérale.

13. L'année dernière, à Fukuoka, nous avions salué l'identification par le Forum sur la stabilité financière des juridictions ne respectant pas les normes internationales en matière de réglementation et de surveillance du secteur financier et nécessitant à ce titre un traitement prioritaire. Nous avions appelé le FMI à réaliser rapidement une évaluation spécifique dans ces centres financiers offshore. Nous attendons qu'il nous présente, lors de la réunion du Forum sur la stabilité financière en septembre, un rapport complet faisant ressortir le nombre de juridictions évaluées à ce jour et présentant une synthèse des résultats de ces évaluations. Nous saluons la décision du Forum de faire le point sur le processus d'évaluation engagé par le FMI et nous lui demandons d'élaborer, en vue de notre réunion de septembre, un rapport sur la mise en oeuvre de ses recommandations à ce jour et les orientations possibles de futures actions.

D Fiscalité

Pratiques fiscales dommageables

14. Nous saluons le rapport du Comité des Affaires Fiscales de l'OCDE sur le projet relatif aux pratiques fiscales dommageables et affirmons notre soutien aux travaux, y compris récents, engagés pour lutter contre ces pratiques dans les pays membres de l'OCDE, les économies non membres et les juridictions qui répondent aux critères des paradis fiscaux. Nous attendons avec impatience la publication du rapport 2001 de l'OCDE sur les progrès réalisés. 15. Nous notons que le projet n'a pas pour but de dicter les taux d'imposition des pays ni la structure de leur système fiscal. Il vise, par la mise en place d'un cadre de coopération permettant aux pays d'oeuvrer ensemble à l'élimination des pratiques fiscales dommageables, à préserver la souveraineté fiscale de tous les Etats et à promouvoir un environnement favorable à une concurrence fiscale loyale. Ce projet contribuera par ailleurs à réduire la criminalité financière. 16. Nous constatons que suite aux travaux menés par l'OCDE, 10 paradis fiscaux se sont à ce jour engagés à mettre fin à leurs pratiques fiscales dommageables d'ici la fin de l'année 2005. En outre, d'autres juridictions identifiées comme paradis fiscaux dans le rapport de l'OCDE de juin 2000 sont désormais en dialogue permanent avec l'OCDE. Nous notons également que l'OCDE envisage de repousser au 30 novembre 2001 la date limite à laquelle des engagements peuvent être pris. Nous encourageons les autres juridictions à s'engager d'ici cette date à mettre en place un système transparent et un échange d'informations efficace et à travailler en coopération avec l'OCDE. Nous apprécierions également que les paradis fiscaux mettent fin à toutes les autres pratiques dommageables à une concurrence fiscale loyale. 17. S'agissant du calendrier de mise en oeuvre d'un cadre potentiel de mesures défensives concertées, nous notons que ce cadre ne pourrait pas s'appliquer dans les pays de l'OCDE avant de le faire dans les juridictions non membres. Nous reconnaissons toutefois que la décision d'adopter des mesures défensives revient à chaque pays. 18. Nous prenons acte du fait que les pays membres de l'OCDE ont réaffirmé leur engagement de mettre fin à leurs pratiques fiscales dommageables d'ici avril 2003 et demandons à l'OCDE d'élaborer les repères permettant d'aider les pays à déterminer si leurs régimes préférentiels sont dommageables. 19. Nous demandons à l'OCDE de poursuivre la surveillance de l'application effective des engagements. 20. Nous notons le dialogue constructif engagé avec les économies non membres de l'OCDE sur leur expérience des pratiques fiscales dommageables et nous espérons qu'il se poursuivra. Le projet aurait tout à gagner de l'association des pays extérieurs à l'OCDE aux travaux et c'est la raison pour laquelle nous recommandons cette démarche. 21. Nous reconnaissons que certaines juridictions pourront avoir besoin d'une assistance technique pour respecter leurs engagements, en particulier en matière d'échange d'information. C'est pourquoi nous demandons aux pays membres de l'OCDE, aux institutions financières internationales et à d'autres instances de prévoir cette éventualité dans l'élaboration de leurs programmes.

Commerce électronique

22. Nous nous félicitons de la progression des travaux de l'OCDE sur la fiscalité du commerce électronique, et en particulier des progrès considérables réalisés depuis le rapport établi à Fukuoka l'an dernier concernant des problèmes spécifiques liés à la fiscalité directe et indirecte ainsi que les défis et perspectives de l'administration fiscale. 23. Nous constatons également que les administrations fiscales des pays membres et non membres de l'OCDE se sont réunies récemment à Montréal et que les conditions cadres d'imposition adoptées à Ottawa en 1998 par les pays de l'OCDE ont reçu un accueil très favorable. 24. Nous encourageons la poursuite d'un dialogue constructif entre gouvernements et entreprises des pays membres et non membres de l'OCDE. 25. Nous demandons à l'OCDE de poursuivre la mise en oeuvre des conditions cadre d'Ottawa sur la fiscalité, en particulier concernant les impôts sur la consommation.

Rôle des institutions financières internationales

26. Les institutions financières internationales ont un rôle important dans la protection de l'intégrité du système financier international contre les pratiques abusives. Le renforcement de la capacité des pays à lutter contre le blanchiment de capitaux s'inscrit pleinement dans ce cadre. 27. Nous nous réjouissons que les conseils du FMI et de la Banque mondiale aient récemment décidé de reconnaître que les 40 Recommandations du GAFI constituent les normes internationales appropriées pour combattre le blanchiment de capitaux. Nous appelons vivement les institutions financières internationales à collaborer avec le GAFI de façon à intégrer dès que possible le contenu des 40 Recommandations dans un rapport sur l'observation des normes et des codes relatifs au blanchiment de capitaux. 28. Nous accueillons avec satisfaction la décision du Fonds et de la Banque d'inclure le contrôle des mesures anti-blanchiment dans l'évaluation et la surveillance du secteur financier, y compris dans les programmes d'évaluation du secteur financier. 29. En raison de l'importance que nous accordons aux mesures anti-blanchiment, nous ne pouvons que nous féliciter de la vigilance accrue des banques multilatérales de développement (BMD) concernant les activités ou les transactions avec des entités situées dans des pays ou territoires non coopératifs. 30. Nous demandons aux institutions financières internationales de fournir une assistance technique aux juridictions qui s'engagent à renforcer leurs capacités institutionnelles et à remédier aux lacunes de leur système anti-blanchiment. Nous encourageons les banques multilatérales de développement régionales et sous-régionales à continuer de consacrer un volet à la lutte contre le blanchiment dans le dialogue et les programmes qu'elles conduisent avec leurs membres. Les résultats devraient être présentés dans le rapport conjoint sur l'application des codes et des normes que nous avons demandé aux BMD de préparer avant la fin de l'année.




.
dépêches AFPD3 rss bottomD4 | Dernière version de cette page : 2004-07-27 | Ecrire au webmestre | Informations légales et éditoriales | Accessibilité