Discours de Mme Bernadette CHIRAC, lors de la réunion de Paris sur la lutte contre les disparitions et l'exploitation sexuelle des enfants.

Discours de Mme Bernadette CHIRAC, à l'occasion de la réunion de Paris sur la lutte contre les disparitions et l'exploitation sexuelle des enfants.

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Palais de l'Élysée, Paris, le mercredi 17 janvier 2007.

Majestés,
Mesdames et Messieurs,

L'état d'une société se juge à l'aune de l'attention et de la protection qu'elle accorde aux plus vulnérables de ses membres, et d'abord à ses enfants.

Nos sociétés contemporaines doivent, à cet égard, faire face à une sombre réalité qui interpelle nos consciences. Chaque année, de très nombreux enfants, en Europe, aux États-Unis, partout dans le monde, disparaissent, plongeant ainsi leurs familles dans la plus terrible des angoisses. Le plus souvent, ces disparitions s'expliquent par une fugue et trouvent une issue heureuse. Dans un grand nombre de cas, hélas, elles ont une autre cause : l'enlèvement par un prédateur sexuel ; et une autre issue : l'enfance victime de la folie des hommes.

Cette réalité, au-delà de l'horreur du fait divers, nous concerne tous, car la menace pèse sur chacun de nos enfants.

Cette menace n'est plus seulement dans la rue, dans une "mauvaise rencontre". Nous qui pensions, il y a peu encore, nos enfants à l'abri dans nos foyers, à la maison, nous réalisons aujourd'hui qu'ils sont exposés à des prédateurs pédophiles qui sévissent sur Internet.

C'est ainsi que, d'après les experts, il existerait plus de 100 000 sites pour diffuser de telles horreurs. C'est ainsi que, s'abritant derrière l'anonymat, des individus, en apparence ordinaires, trouvent sur la toile les moyens d'assouvir leur perversion et d'approcher de potentielles victimes en leur extorquant leurs coordonnées ou en les attirant dans leur piège. C'est ainsi que, d'après les spécialistes, trois enfants sur dix font aujourd'hui l'objet de sollicitations par des pédophiles.

La souffrance indicible des enfants martyrs s'incarne dans quelques noms à jamais inscrits dans nos mémoires.

Ayons une pensée, parmi tant d'autres, pour Marion, Estelle et Jonathan disparus ici en France.

Souvenons-nous d'Amber, dont la disparition a inspiré aux États-Unis la mise en place d'un remarquable dispositif d'alerte par les médias pour les enlèvements d'enfants. Nous y reviendrons.

Souvenons-nous également de Julie et Melissa, à jamais unies dans nos cœurs comme elles l'ont été, à huit ans, dans la captivité et dans la mort. Leur calvaire, bien au-delà de la Belgique, a secoué l'Europe et le monde, suscitant une prise de conscience et une immense mobilisation dont notre réunion, aujourd'hui à Paris, est le prolongement.

C'est en effet à la suite de leur disparition tragique que fut créée en Belgique l'association Child Focus, avec le soutien de Sa Majesté la Reine des Belges. C'est à partir de là que s'est développé ensuite le réseau des ONG de la Fédération européenne pour les enfants disparus et sexuellement exploités. C'est à la suite de ce drame qu'a été créé, en 1998, le Centre international pour les enfants disparus et exploités, l'ICMEC, afin d'élargir encore la coopération internationale.

Je tiens à rendre aujourd'hui un particulier hommage à Sa Majesté la Reine des Belges. Chacun connaît ici son engagement et sa mobilisation pour cette cause. Chacun a en mémoire le grand rassemblement avec la société civile qu'elle avait organisé en 2004 au Palais Royal de Bruxelles. C'est à son initiative que, avec l'ensemble du Comité d'honneur de l'ICMEC, j'ai souhaité organiser aujourd'hui cette réunion de Paris.

A cet égard, je suis particulièrement heureuse que la préparation de cet événement ait permis de donner une impulsion décisive à la création d'un numéro unique européen pour les disparitions d'enfants : le 116 000. Il s'agit là d'une avancée majeure et exemplaire, qui place l'Europe au premier rang de la mobilisation internationale.

Je veux aujourd'hui remercier la Commission européenne, son Vice Président, Monsieur FRATTINI, et Madame REDING, à laquelle je tiens à rendre hommage, pour nous avoir permis de lever -dans des délais extrêmement courts- tous les obstacles techniques afin de créer ce numéro, qui entrera en service dans les prochaines semaines.

Au-delà de ce succès, beaucoup reste à faire, pour lutter contre la pédophilie et la pornographie infantile sur Internet, qui est un des grands fléaux de notre temps, et pour mobiliser les médias. Ce combat requiert un changement d'échelle dans la coopération européenne et internationale. Il requiert aussi la contribution de tous les acteurs publics, privés et associatifs. Je veux ici rendre un hommage particulier à l'engagement de toutes les associations et ONG, dont beaucoup sont ici représentées, et qui mènent de longue date un combat sans merci pour la noble cause qui nous réunit.

Majestés,
Mesdames et Messieurs,

Les disparitions et l'exploitation sexuelle des enfants sont un des grands drames de notre temps.

En tant que femmes, en tant que mères, chacune à la place qui est la nôtre, nous avons le devoir, la responsabilité d'alerter l'opinion publique sur la gravité de ce phénomène et d'interpeller les responsables politiques pour qu'ils prennent leurs responsabilités et mettent en place sans tarder les mesures qui s'imposent.

Tel est l'objectif de cette rencontre de Paris. Pour que l'enfance demeure toujours le temps de l'innocence et de la promesse.

Je vous remercie.





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